Marseille, rue d’Aubagne : six ans âpres [portfolio]


Photoreportage inédit | Ballast

Dimanche der­nier a eu lieu à Marseille une « marche pour la jus­tice et un loge­ment digne », orga­ni­sée par le Collectif du 5 novembre (C5N), qui a vu le jour après les effon­dre­ments d’im­meubles sur­ve­nus à cette date, en 2018, rue d’Aubagne. Marcher, donc, pour com­mé­mo­rer le drame, mais aus­si pour lever le poing et mettre la pres­sion sur le pro­cès qui a débu­té ce jeu­di 7 novembre. Six ans après : six années âpres à attendre le réveil de la machine judi­ciaire et espé­rer obte­nir recon­nais­sance et répa­ra­tion. En atten­dant l’a­bou­tis­se­ment de la pro­cé­dure — consi­dè­re­ra-t-on vrai­ment que « la pluie » est seule res­pon­sable des effon­dre­ments ? —, retour en images sur le rassemblement.


Notre-Dame-du-Mont, Marseille 2024. Dimanche 3 novembre, six ans après les effondrements survenus rue d'Aubagne à Marseille, la marche pour la justice et un logement digne organisée par le Collectif du 5 novembre (C5N) prend son départ à la station Notre-Dame-du-Mont. En tête de cortège, Liliana Lalonde, mère de Julien, l'une des huit victimes des effondrements. Ci-dessus, le bras en action de Zohra Boukenouche, militante du C5N et habitante du quartier de la Plaine.

Noailles, Marseille 2022. Des étrésillons renforcent les fenêtres et les fissures lézardent les immeubles de la rue Jean-Roque. Elle n'est située qu'à quelques pas de la rue d'Aubagne, où ont eu lieu les effondrements.

Notre-Dame-du-Mont, Marseille 2024. Alors que le procès s'ouvre la semaine prochaine, les manifestants demandent justice. Se souvenir des noms, se souvenir des visages, tant des victimes que des responsables : "Ni oubli, ni pardon". Cette phrase sera scandée durant toute la marche. Six ans après, des milliers de manifestants et d'habitants, "tous des enfants de Marseille", sont toujours là pour honorer cette parole.

Rue Jean-Roque, Marseille, 2022 et Noailles, Marseille, 2024. Les habitants et manifestants se soutiennent, avancent main dans la main.

Noailles, Marseille, 2024. La marche s'arrête devant le lieu des effondrements, dit "la dent creuse" — depuis 6 ans, ici, rien ne semble avoir véritablement changé. Différents membres du C5N et des proches de victimes se recueillent. Une minute de silence est faite en hommage à ces dernières : Julien, 30 ans ; Taher, 58 ans ; Chérif, 36 ans ; Fabien, 52 ans ; Simona, 30 ans ; Niasse, 26 ans ; Ouloume, 55 ans ; Marie-Emmanuelle, 55 ans ; et aussi Zineb Redouane, 80 ans, "neuvième victime des effondrements", décédée suite à un tir de gaz lacrymogène par les forces de l'ordre en décembre 2018, un jour où ont eu lieu en même temps une manifestation des gilets jaunes et une marche organisée par le C5N.

Noailles, Marseille 2024. Pendant cette minute de silence, l'émotion est palpable. Les larmes peinent à être retenues. Les mains se cherchent, se serrent, se rassurent.

Noailles, Marseille 2022. Être pris pour un pigeon ? Des effondrements à aujourd'hui, certains endroits du quartier populaire qu'est Noailles semblent tomber en ruine — comme tant d'autres à Marseille. L'horizon paraît obstrué.

Noailles, Marseille 2024. Les habitants de Noailles regardent, observent la mutation des lieux. À quelques pas des effondrements, le bas de la rue d'Aubagne avec ses commerces flambants neuf fait l'objet, comme un graffiti l'indique, d'une "boboisation".

Noailles, Marseille 2024. Ce manifestant, pour sa part, vient de Grenoble où il milite. Il prendra la parole un peu plus tard lors de cette marche et fera le lien entre les villes. De Paris à Marseille en passant par Grenoble, la question de l'habitat indigne et le problème de la spéculation immobilière sont partagés.

Marseille 2022 et Noailles, Marseille 2024. La marche défile devant de "nouveaux commerces" du bas de la rue.

Noailles, Marseille 2022. Une photographie d'un collage où les temporalités se télescopent. "Que fait la mairie ?", lit-on sur le mur, juste au-dessus de la tête de cet adolescent. Il est figé là, depuis 2021, attendant qu'on lui réponde. La question semble toujours d'actualité.


Photographie de ban­nière : Cyrille Choupas | Ballast


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REBONDS

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Djibril Maïga

Surdiplômé de l'école buissonnière de Tombouctou, poète des heures perdues, journaliste cherchant la coquille, anarchiste comme « la rencontre fortuite entre une table de dissection et d'un parapluie ».

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