Texte inédit pour le site de Ballast
Prendre la route — celle de l’ancien empire soviétique — munie d’un magnétophone. Quand la porte s’ouvre, enregistrer chaque vécu, le collecter comme un matériau. Écrire l’Histoire selon la pluralité des expériences et des émotions qui la composent et non selon l’alignement des faits. C’est, depuis toujours, le travail de fourmi de l’écrivaine d’origine biélorusse Svetlana Alexievitch, qui s’évertue à ramasser sur son passage les voix silencieuses, restées vivantes derrière les guerres. Une rigueur qu’elle s’imposa dès son premier ouvrage, interdit dans son pays d’origine, à la fois censuré et acclamé sous la Russie de Gorbatchev : La Guerre n’a pas un visage de femme, paru en 1985. « Les choses ne m’intéressent pas lorsqu’elles se situent sur le plan idéologique, qui reste pour moi superficiel », dira dans un entretien cette proche de la journaliste Anna Politkovskaïa. En ouvrant ce livre, qui transforme le journalisme en œuvre littéraire, nous, lecteurs encore bâtis sur le souvenir de la Seconde Guerre mondiale, réalisons combien nous ignorions. Combien nous sommes encore amputés du vécu, du regard et de l’enseignement de l’autre moitié de la population : les femmes. Amputés, dès lors, de ce qu’il est commun d’appeler notre Histoire. ☰ Par Laélia Véron
Un bataillon de soldats russes s’avance. Un bataillon composé majoritairement de femmes, et beaucoup d’entre elles ont du sang qui dégouline entre les jambes. Elles marchent depuis des heures ; elles ont leurs règles et rien pour dissimuler ce sang. Si bien que lorsqu’elles arrivent à un point d’eau, elles s’y précipitent et n’en sortent pas, même lorsque les Allemands mitraillent. « Nous avions besoin de nous laver, car nous avions trop honte devant les hommes… Nous ne voulions pas sortir de l’eau, et une fille a été tuée1)… » La honte d’avoir leurs règles plus forte que la peur de la mort. Cette scène de La Guerre n’a pas un visage de femme a fait partie des passages supprimés par la censure lors de la première édition du livre, en 1985 — passages qui n’ont pu être rétablis qu’en 2003. Il s’agissait de « détails physiologiques » qui n’avaient rien à voir avec la réalité de la femme soviétique, encore moins de la femme soviétique dans la guerre, avaient asséné les censeurs — malgré les protestations de l’auteure. Un dialogue emmuré : Alexievitch en était alors à son premier ouvrage et, déjà loyale à la vérité des laissés-pour-compte, affirmait en vain vouloir peindre une autre guerre et une autre réalité, une expérience que les hommes n’avaient pas vécue, qu’un auteur masculin ne pouvait raconter : les femmes dans la guerre. Rappelons déjà quelques chiffres, en ouverture du livre, afin de prendre la mesure de ce dont on parle : 225 000 femmes dans les différents corps de l’armée britannique ; entre 450 et 500 000 dans l’armée américaine ; 500 000 en Allemagne ; 800 000 dans l’armée soviétique.
L’étrange neutralité de l’histoire de la guerre
La démarche d’Alexievitch — parler spécifiquement de la guerre des femmes en tant que femme — va à contre-courant d’une doxa littéraire à l’épreuve des décennies : afin d’écrire un grand livre qui ne sera pas immédiatement catalogué comme de la littérature de filles, la femme doit oublier son sexe. Tout bon étudiant de littérature ou critique littéraire lambda qui s’interroge sur l’écriture féminine, qu’il s’agisse de la question de l’existence possible d’un style féminin ou du statut de la femme auteure, terminera sa dissertation ou son article par une envolée lyrique sur la fameuse nécessité de dépasser l’individualité, qu’elle soit celle d’un homme ou d’une femme, pour accéder à une neutralité supposément universaliste.
« Alexievitch, déja loyale à la vérité des laissés-pour-compte, affirmait vouloir peindre une autre guerre que les hommes n’avaient pas vécue, qu’un auteur homme ne pouvait raconter. »
Ainsi, l’historienne et traductrice Galia Ackerman et le sociologue Frédérick Lemarchand parlent-ils, non sans un certain mépris (et sans réelle justification) de la « verve féministe un peu obsolète2 » d’Alexievitch. Mais si nous nous posons honnêtement la question des enjeux spécifiques des rapports entre genre et littérature, il est facile de voir que cette apparente neutralité est en fait parfaitement marquée : elle est masculine. L’auteure anglaise Virginia Woolf le montrait déjà dans son essai Une chambre à soi : tout écrivaine se trouvera confrontée à la littérature passée et risquera toujours de se définir par rapport à la figure de l’auteur masculin, que ce soit en se dévalorisant ou en s’affirmant par rapport à lui. Écrire de manière neutre impliquerait de parvenir à ne pas écrire par rapport à ces normes fondées sur quelques siècles d’écriture masculine. D’évidence, c’est impossible : tout écrivain s’inscrit dans un champ littéraire déjà investi. Mais rappelons, s’il en est besoin, que ce champ est non seulement dominé historiquement (les hommes font et sont l’Histoire) mais également hiérarchisé en termes de valeurs déterminées par celles du monde social le plus influent. La spécificité du champ littéraire est son extrême individualisation. Cette dernière invisibilise d’autant plus les rapports structurels de domination : réfléchir sur le sexe de l’auteur.e paraît alors facilement hors de propos.
Pourtant, l’histoire de ces auteures, leur place sociale et leur accès à la littérature étant spécifique, il y a, de fait, une différence dans la forme et dans les thèmes traités par ces femmes. Woolf, toujours, rappelait que c’est au XIXe siècle qu’elles sont véritablement entrées en littérature, pour investir majoritairement les champs du roman et la psychologie. Cette répartition n’avait pas grand-chose à voir avec une quelconque nature, c’était avant tout « la seule formation littéraire que pût avoir une femme au début du XIXe siècle, celle de l’observation des caractères, de l’analyse des émotions3 ». Elles firent ainsi, ajoute Woolf en reprenant Charlotte Brontë, avantage de ce que « la coutume a décrété nécessaire à leur sexe ». L’essayiste Mona Chollet, dans son essai Beauté fatale, dresse le même constat : la littérature féminine traduit souvent ce qu’on pourrait appeler une culture féminine de l’intime4.
Les choix se dessinent d’eux-mêmes, pour la femme auteure. Le plus immédiat serait d’assumer cette disposition culturelle, risquant alors de se retrouver classée dans la « petite littérature », la littérature genrée des sentiments, et non pas dans la « grande littérature », la littérature sérieuse. Chollet souligne cette préoccupation dans l’œuvre de Nancy Huston, sur le grand roman, supposé traiter de grands thèmes : « LA MORT, par exemple. AUSCHWITZ. L’HORREUR. LE NON-SENS. MA BITE. LA CRUAUTÉ. » Et Huston de rappeler : « Or il va de soi que les GRANDES choses exècrent les petites. » Culturellement, les valeurs des femmes et des hommes diffèrent, mais dans un monde littéraire (qu’il s’agisse de la création ou de la critique) dominé par les hommes, ces valeurs sont échelonnées. Woolf résume, dans Une chambre à soi, cette hiérarchisation. « [C]e sont les valeurs masculines qui prédominent. Parlons franc, le football et le sport sont des choses importantes
; le culte de la mode, l’achat de vêtements sont choses futiles
. Et il est inévitable que ces valeurs soient transportées de la vie dans la fiction. Ce livre est important, déclare le critique, parce qu’il traite de la guerre. Ce livre est insignifiant, parce qu’il traite des sentiments des femmes dans un salon. » Cela a beau être plus que contestable (on serait en droit de se demander pourquoi les écrits de Henry Miller — de fastidieuses digressions sur ses exploits sexuels — auraient un intérêt plus important que les confessions d’une accro du shopping), cette réalité reste tenace, et la femme auteure sera obligée de s’y cogner. Pour Chollet, deux solutions se dessinent : la première, serait d’« investir des champs communs aux deux sexes le plus souvent accaparé par les hommes », afin de « contester leur hégémonie sur leur propre terrain ». La seconde : « universaliser la culture féminine5 ». Elle écrit : « Assumer sa propre sensibilité, sa propre manière de voir et de faire, qui peuvent être héritées d’un passé de domination, mais qui, lorsqu’on a le courage de les imposer sur la place politique, au lieu de les ruminer frileusement dans l’entre soi féminin, se révèle d’une grande valeur pour l’ensemble de la société6. »
Mais revenons à Alexievitch et cette guerre sans visages de femmes. Il lui aura fallu sept années pour recueillir les centaines de témoignages qui bâtissent ce livre remarquable, où elle réussit justement à aller sur un terrain dit masculin en revendiquant une écriture dite féminine. Écrire sur ce thème mille fois développé par les hommes, qui semble masculin par excellence — la guerre — tout en assumant son choix de parler des femmes en tant que femme. Elle se met en scène en tant qu’auteure, narratrice et auditrice, raconte le conflit armé et, sillonnant le pays, donne la parole à celles qui furent combattantes, infirmières au front, conductrices de char ou brancardières. La forme même de ce nouveau type de roman — hybride — qu’on appellera par la suite « littérature documentaire7 », mais qu’Alexievitch préfèrera appeler « le roman des voix », est assumée comme féminine. Bien entendu, cette attention portée aux voix, cette forme polyphonique, cette succession de monologues, s’inscrit dans la tradition russe de la présence permanente, obstinée de la parole, du logos [discours ou raison, en grec, ndlr], qu’on retrouve également chez Dostoïevski (dont Alexievitch se réclame plusieurs fois). Mais cette polyphonie de témoignages intimes est aussi celle des conversations de cuisine, de ces espaces où les femmes, se réunissent pour parler de leurs affaires intimes. La journaliste reporte ces témoignages, contextualisant chacun d’entre eux, chaque rencontre8, rappelant la difficulté, parfois, de recueillir certaines paroles.
« Nous sommes prisonniers d’images
masculineset de sensationsmasculinesde la guerre. »
Son livre, sous la forme de brèves digressions narratoriales, est traversé par la conscience de la dimension radicalement nouvelle de son projet. « Tout ce que nous savons, cependant, de la guerre, nous a été conté par des hommes. Nous sommes prisonniers d’images masculines
et de sensations masculines
de la guerre. Les femmes se réfugient toujours dans le silence, et si d’aventure elles se décident à parler, elles racontent non pas leur guerre, mais celle des autres. Elles adoptent un langage qui n’est pas le leur. Se conforment à l’immuable modèle masculin. » Et Alexievitch d’ajouter : « Et ce n’est que dans l’intimité de la maison ou bien entourées d’anciennes camarades du front, qu’après avoir essuyé quelques larmes, elles évoquent devant vous une guerre […] à vous faire défaillir le cœur. […] Les récits des femmes sont d’une autre nature et traitent d’un autre sujet. La guerre féminine
possède ses propres couleurs, ses propres odeurs, son propre éclairage et son propre espace de sentiment. Ses propres mots enfin. »
La posture d’Alexievitch est dès lors particulièrement polémique. Et pour cause, son parti pris repose sur le postulat d’une différence hommes/femmes qui n’est pas présentée comme le résultat d’une construction culturelle et historique mais bien comme essentialisée. Elle ne raconte pas seulement l’histoire spécifique des femmes ; elle voudrait, déclare t‑elle, insérer dans chaque récit le « mystère féminin », la marque d’une essence féminine foncièrement différente. Peu originale, et raccord avec les poncifs de sa génération, Alexievitch estime que la nature masculine serait plus rationnelle et la nature féminine plus sensible et sensuelle9. Dans le contexte de sa réflexion sur l’approche genrée de la guerre, c’est une autre manière d’opposer, d’un côté, l’Histoire officielle militaire et rationnelle des hommes, à la petite histoire intime et sensible des femmes. Mettant en scène son travail d’écrivaine, elle ne se présente pas comme une narratrice active mais assume l’empathie de sa démarche : elle écoute ces femmes, pleure avec elle, et semble — mais cela est, nous le verrons plus loin, un faux-semblant — directement retranscrire leur témoignage, sans les interrompre, leur poser de questions ou les guider. Cette démarche, taxée par certains de « larmoyante10 », s’avère être du pain béni pour qui voudrait formuler des reproches à une certaine littérature contemporaine, jugée trop sentimentale et qui serait finalement peu féministe, puisqu’elle cantonnerait les femmes aux larmes et aux sentiments. De fait, Alexievitch assume la survalorisation de la sensibilité par rapport au rationnel, en choisissant le parti pris d’une littérature du témoignage.
Disons-le tout net : il serait erroné d’appliquer ces critiques à La Guerre n’a pas un visage de femme. Et grandement réducteur. Car, nul ne l’apprendra, le discours que porte tout auteur sur son œuvre sera toujours en décalage avec la réception de ladite œuvre, voire même avec son contenu. En d’autres termes : tout livre devient un ouvrage autonome et dépasse forcément le projet initial — ou officiel — de son auteur. Revenons donc à l’œuvre même.
« Humiliées et offensées »
L’Histoire, nous ne l’ignorons pas, a ses zones sombres. Ses inconnus, ses non-dits, coincés quelques part dans l’ombre de l’Histoire officielle. Écrire sur les femmes de la Seconde Guerre mondiale, c’est tout d’abord rétablir une vérité historique. Environ 800 000 jeunes filles (la moyenne d’âge était de 17 ou 18 ans11, la plupart étaient donc trop jeunes pour être en possession du livret militaire, de rigueur pour tous depuis 1925) se sont engagées dans l’armée russe dirigée par Staline. Des portées volontaires, puisque, même au moment le plus dur de la guerre, elles ne furent pas mobilisées (en dehors des professions spécialisées : téléphonistes, médecins, etc). Ces femmes, auxquelles il faut ajouter toutes les partisanes russes, étaient donc prêtes à se sacrifier pour leur patrie. Or, si durant la guerre la propagande russe a souligné leur rôle (à l’instar des pilotes Mariya Dolina et ses « Sorcières de la nuit », ou encore Lydia Litvak, réputée pour avoir peint un lys blanc sur chaque avion nazi abattu), très rapidement après la victoire, leur action fut minimisée, voire occultée, au point que d’aucuns nient encore leur participation. Beaucoup d’auteurs ont soit édulcoré et romantisé le rôle militaire des femmes, soit escamoté leur présence. C’est le cas de Viktor Nekrasov, qui, en 1947, publia le très acclamé Dans les tranchées de Stalingrad. Aucune femme soldat n’y apparaît. La seule présence féminine est celle d’une infirmière avec laquelle le héros aura une aventure amoureuse. Triste sort. Renvoyées à des ambitions genrées d’épouse et de mère, les femmes-soldats se sont elles-mêmes tues pendant longtemps. Ce n’est qu’à partir des années 1960 que bon nombre de vétéranes publient, la plupart du temps dans l’indifférence de la société russe, leurs mémoires de guerre. La véritable étape, mentionnée d’ailleurs par Alexievitch dans La Guerre n’a pas un visage de femme sera l’article publié par Vera Tkatchenko dans le journal soviétique la Pravda, article dénonçant l’oubli de ces vétéranes. Alexievitch ne manquera pas de s’emparer de cet oubli.
Ce choix de la pluralité des voix, différence majeure avec la littérature contemporaine du témoignage individuel victimaire, permet de montrer la complexité et l’authenticité d’une expérience historique. Bon nombre de témoignages réhabilitent les capacités militaires des femmes soviétiques, capacités qui parfois dépassent aussi bien leurs chefs, que leurs compagnons d’armes et leurs adversaires — on songe à cet officier allemand capturé qui n’arriva pas à croire que le tireur d’élite ayant mis en déroute son régiment était une toute jeune femme. « Pour ce qui est de la première épreuve, nous nous en sommes très bien tirées, mieux même que les hommes tireurs d’élite qui avaient été rappelés des avant-lignes pour un stage de deux jours. » Ainsi s’ouvre l’œuvre.
« Son projet diffère de la propagande de régime, réhabilitant les difficultés particulières qu’eurent à subir les femmes aussi bien pendant la guerre que dans la difficile période de reconstruction. »
Alexievitch, qui insiste plusieurs fois sur sa volonté de donner la parole aux « petits », propose des témoignages qui montrent à quel point ce courage excède le seul domaine militaire : ce sont ces infirmières qui n’hésitent pas à bondir hors des tranchées pour tenter de ramener et de soigner les soldats blessés, quitte à perdre la vie ; ce sont ces blanchisseuses dont le travail est essentiel (pour préparer les pansements) et extrêmement difficile (les femmes souffraient d’hernies, d’eczéma, quand elles n’étaient pas touchées elles-même, etc). Ce sont ces partisanes blessées, supportant des amputations sans iode, avec scies de menuisiers en pleine forêt. Ce sont celles qui résistent à la torture. Ce sont ces femmes qui utilisèrent leur statut de mère pour mieux tromper l’ennemi ; comme celle-ci, qui prit son bébé pour faire passer des médicaments, des bandes, du sérum, des tracts, ou cette autre qui profita de son ventre de femme enceinte pour transporter une mine. Les femmes soviétiques ont, durant la guerre, dépassé leur rôle d’épouse et de mère afin de devenir des combattantes. Un problème linguistique est même apparu : les fonctions qu’elles employaient n’avaient pas de place dans la langue masculine : « Ces mots sapeur, fantassin, mitrailleur n’avaient pas de féminin, car ce genre de besogne n’avait jamais encore été accompli par des femmes. Les termes féminins sont nés là-bas, au front… » Alexievitch rapporte leurs paroles et, au passage, redonne à la langue sa part manquante, en la féminisant.
Les témoignages de ces femmes devenues âgées — si jeunes encore, à l’époque de la guerre — laissent entrevoir, par leurs souvenirs, ce qu’était l’horreur. La naïveté de leur regard adolescent est encore présente, recouverte par les décennies. On assiste à des moments d’héroïsme toujours livrés « de l’intérieur », avec émotion. L’une d’elles raconte avoir résisté à la torture et donné un cours de marxisme à celui qui l’interrogeait ; quelques lignes plus loin, cette même femme conte à Alexievitch le jour où, croupissant dans un cachot avec ses camarades, elles se firent la courte échelle pour pouvoir apercevoir… une fleur12. Les faits héroïques alternent avec les moments plus personnels. Lorsque certaines femmes demeurent fidèles à leur idéal de guerre, d’autres parlent de traumatisme, de souffrance ou de regrets. Il serait donc erroné, comme l’affirment Ackerman et Lemarchand13, de parler au singulier de « l’image collective d’[une] jeune[sse] soviétique » alors que l’œuvre d’Alexievitch met en scène des approches plurielles d’une même guerre. Son projet diffère radicalement de la propagande de régime, réhabilitant les difficultés particulières qu’eurent à subir les femmes, aussi bien pendant la guerre que dans la difficile période de reconstruction de l’après-guerre. Malgré leur volontariat et leur implication, elles furent en butte contre le système patriarcal, et furent largement « humiliées et offensées ».
Le propre de tout conflit armé est de n’épargner personne. Entre 23 et 27 millions de morts, rien que sur le front soviétique. 550 000 Juifs exterminés dès les premiers mois de l’Opération Barbarossa (les témoignages recueillis par Alexievitch n’évoquent aucunement ce point aveugle du front soviétique dans La Guerre n’a pas un visage de femme comme le souligne Lemarchand. Cependant l’antisémitisme et le massacre des Juifs sont bien mentionnés dans Derniers Témoins). Les femmes soldats furent confrontées à une violence physique et symbolique particulière. Considérées comme a priori moins capables que leurs camarades, il leur fallut doublement prouver leur valeur militaire, se battre contre le mépris de leurs chefs qui, souvent, refusaient de les laisser accomplir le travail que suppose leur grade et leur formation ; se battre aussi contre les superstitions des autres, comme cette femme de la marine qui dut cacher son sexe, tant était tenace l’idée qu’une femme à bord d’un bateau portait malheur… Quant au corps des femmes, il n’était simplement pas pris en compte, et ce dès leur engagement (toutes s’attardent sur les mêmes anecdotes), jusqu’à l’équipement qu’on leur donnait — prévu pour les hommes : des vêtements et des chaussures, beaucoup trop grandes, qui transformaient n’importe quelle marche en torture.
Mais la violence la plus constante qu’elles eurent à subir fut la menace sexuelle. Menaces de viol et de sévices par l’adversaire allemand14, et, on imaginera combien cela fut moins simple à admettre, par leurs propres supérieurs et camarades15. Pourtant, autre point aveugle du livre, de nombreux moments d’amour, de camaraderie entre hommes et femmes sont mentionnés, contre un seul témoignage évoquant cette violence sexuelle. « J’étais moins anxieuse durant le combat qu’après », confie l’une d’elle à Alexievitch. « Tant que l’ennemi tirait, tant qu’on était sous le feu, ils appelaient : Infirmière ! Frangine !
mais après le combat, chacun te guettait… Impossible, la nuit, de sortir de son gourbi… Les autres filles ne vous l’ont pas dit ? Je pense qu’elles ont eu honte… Elles ont préféré passer ça sous silence. Elles sont trop fières ! Mais c’est comme ça que les choses se passaient… » La vétérane qui brise ce tabou affirme que cette situation était la norme, et dépeint des femmes plus anxieuses après le combat que pendant la bataille, lorsqu’elles se retrouvaient à la merci, non des balles, mais des corps de leurs collègues. Certaines, surnommées les « épouses de campagne » finirent ainsi par devenir maîtresse d’un officier, non par désir, mais pour être protégées des autres hommes. Ce choix contraint ressemble de manière frappante à la situation que décrit Marta Hillers dans Une femme à Berlin, lorsqu’elle devient la maîtresse d’un officier soviétique, préférant être violée régulièrement par la même personne que de vivre sans cesse sous la peur. Les femmes, de toutes contrées, ont toujours subi une recrudescence de violences sexuelles durant les guerres : rappelons-nous celles qui furent violées par les Américains à la Libération de la France ; le sort des civiles allemandes, qui croisèrent la route de l’Armée rouge ; le système d’esclavage sexuel organisé à travers l’Asie par et pour l’armée japonaise (esclavage toujours scandaleusement désigné par le doux euphémisme de « femmes de réconfort ») et les collabos tondues à la libération. On évoque même, du bout des lèvres, des viols de rescapées, lors de la libération des camps. Peu importait, finalement, qu’elles fussent dans le même camp ou dans le camp ennemi : le corps des femmes restait un champ de bataille.
« Elles furent confrontées à une injonction contradictoire : redevenir des femmes dans les contours tracés par la société, malgré une expérience de la guerre qui les avait transformées à jamais. »
Après la victoire s’ouvrit une autre lutte, « une autre guerre. Elle aussi atroce », comme le soulignera une vétérane. Au-delà des difficultés économiques partagées par les survivants de la Seconde Guerre mondiale16, les femmes ne participèrent pas à la liesse de la victoire. Elles reçurent de « petites médailles » et, après les premières célébrations, furent rayées des réunions de vétérans, des commémorations de la victoire. Elles ne purent guère, comme les hommes, bénéficier de commodités spéciales dues à leur statut (denrées, appartement individuel). Pourquoi ? La guerre terminée, il s’agissait d’en refaire des femmes ordinaires ; il fallait, d’urgence, échanger la victoire militaire, comme le dit l’un de ces femmes, « contre le bonheur féminin ordinaire », c’est-à-dire le foyer. Les vétéranes se virent brutalement rappelées à leur statut de femmes : elles qui n’avaient jamais porté de jupes pendant la guerre furent sommées de le faire pour défiler à la parade ; elles perdirent alors la camaraderie de combat qu’elles avaient pu établir avec leurs compagnons de guerre qui se mirent à les traiter comme des étrangères ; elles furent confrontées à la colère de ces autres filles restées à l’arrière qui, désarçonnées, les suspectèrent, en bloc, de s’être engagées pour courtiser les soldats. Après la victoire, ces anciennes soldates sont soudain renvoyées à un statut social et genré, en contradiction avec leur expérience de la guerre. Contrairement aux hommes soviétiques, dont l’identité fut construite en grande partie sur la victoire contre les nazis et pour qui l’exigence sociale est partiellement homologue à leur expérience personnelle, elles furent confrontées à une injonction contradictoire : redevenir des femmes dans les contours tracés par la société, malgré une expérience de la guerre qui les avait transformées à jamais. C’est ce paradoxe existentiel qui intéresse Alexievitch, ce moment où l’histoire permet d’apercevoir les limites de l’être humain, de « jeter un coup d’œil dans le gouffre17 ».
Femme et guerre, ou la frontière de l’être et du néant
La guerre n’a pas un visage de femme, écrit Alexiévitch. Une évidence. Leur identité est sans cesse éclatée par des représentations et des exigences contradictoires. La femme qui tue s’inscrit brutalement contre la représentation éternelle de la femme mère qui donne la vie18. Leur expérience guerrière brise les hiérarchies et classement genrés des comportements et des émotions. Comme le dit l’une d’entre elles : « J’ai l’impression d’avoir vécu deux vies : une vie d’homme et une vie de femme… » Ces deux vies s’entremêlent pourtant, et tant pis si les normes sociales essaient d’imposer une distinction entre la vie d’homme (le soldat au front) et la vie de femme (d’épouse et de mère, après la guerre). Au front on demandait aux soldates d’être des hommes pour être prises au sérieux, c’est-à-dire de renoncer à tout attribut féminin. Après la guerre : plus d’uniformes ni de médailles apparentes. Ces femmes qui ont vécu une expérience transformatrice véritablement exceptionnelle ne furent plus comprises par leurs compatriotes déstabilisés. Cette perplexité est exprimée avec naïveté par les enfants, comme ce petit garçon qui crie tour à tour « Papa ! » et « Maman ! » quand, après la guerre, sa mère vient en uniforme le récupérer. « Grand-mère, avant tu étais un garçon, c’est ça ? », interrogera une petite jeune fille en voyant les photos de son aïeule.
Une femme officier raconte une soirée de bal, où, parée, coiffée et vêtue d’une robe, aucun de ses camarades soldat ne la reconnaît. Il semble particulièrement compliqué pour les hommes d’admettre la réunion d’attributs et de représentations aussi complexe en une seule personne. La société entière a recraché ces femmes dans des cadres normatifs. Elles n’étaient plus des êtres humains, mais des « filles-soldats », une entité asociale et mal acceptée, compliquant les mariages de couples rencontrés au front, et les rapports familiaux. Les anecdotes d’Alexievitch ne manquent pas : il était déshonorant, pour un homme, de se marier avec une ancienne soldate. « Tu as deux sœurs cadettes. Qui voudra les épouser maintenant ? », dit une mère en désaccord avec le mariage de son fils. « Tu n’as pas un cœur de femme », s’entendra dire une vétérane venue récupérer son enfant, jusqu’alors confié à sa belle-sœur pendant qu’elle était au front ; pas un cœur de femme du fait d’avoir du ôter la vie. « Est-ce qu’une femme normale irait à la guerre ? Apprendrait à tirer ? C’est pour cela que tu n’es pas capable de donner naissance à un enfant normal », dira un mari à son épouse, ayant mis au monde un enfant mentalement déficient. Elle se croira maudite.
« Nul ne saurait désigner d’un doigt ferme le responsable de cette mort lente : l’expérience sauvage de la guerre, ou cette
autre guerresociale. »
Si la guerre fit de l’homme un héros, elle fit de la femme une anormale. Ce fut bien ce verdict d’anormalité, traduction sociale de leur identité hybride, qui conduisit bon nombre de ces femmes au bord de la folie, voire du suicide. Des anormales, mais aussi des folles, des parias, des monstruosités : c’est d’ailleurs ainsi que l’armée allemande présenta à ses soldats les enrôlées volontaires russes. Ces femmes savaient que, contrairement aux hommes, une fois prisonnières elles ne seraient pas abattues sur place, mais traînées et données en spectacle aux soldats ennemis comme des bêtes de foire : « Tenez, regardez, ce ne sont pas des femmes, mais des monstres ! Des fanatiques russes ! » Propagande, dira-t-on. Propagande allemande pour éviter que leurs recrus ne puissent prendre en pitié les femmes russes.
Pourtant, après la guerre, elles seront confrontées à ces mêmes stigmatisations dans leur propre pays19. Certaines femmes tinrent à devenir « normales » à tout prix, à l’instar de cette vétérane qui déchira ses papiers militaires pour pouvoir espérer se marier, mais qui se retrouvera par la suite seule, gravement malade, sans les papiers qui lui permettraient de pouvoir se faire soigner et loger convenablement. Si d’aucunes arrivèrent à reconstruire une vie après la guerre, bon nombre d’entre elles avancèrent comme des mortes-vivantes. Et nul ne saurait désigner d’un doigt ferme le responsable de cette mort lente : l’expérience sauvage de la guerre, ou cette « autre guerre » sociale, à laquelle rien ne les préparait, et cette angoisse de ne pas être « normale[s] », « comme les autres ». Tragique condition de ces femmes, dont l’histoire nocturne fut celle d’un déchirement existentiel, d’une histoire ignorée. Or, si leur mémoire fut ignorée, Alexievitch le souligne clairement, c’est parce qu’une autre histoire l’emportera, celle qui fera la grande Histoire, officielle et héroïque.
Alexievitch présente son projet d’écriture comme construit en opposition à l’Histoire masculine dominante. Lors d’un entretien accordé à la revue XXI, elle dira : « La culture militaire de la soumission, l’héroïsation de la force, l’exaltation de la virilité, ce jeu suprême qu’est la guerre pour les hommes, le plaisir avec lequel ils endossent l’uniforme, ce sont des sujets pour la littérature. » Elle décide délibérément de ne pas écrire sur les grandes figures de la guerre : elle ne mentionne le résistant Vassili Zakharovitch Korj qu’en passant — c’est à sa femme et à ses deux filles qu’elle donne la parole. Elle se heurte rapidement à des difficultés symboliques : la censure des hommes et l’autocensure des femmes. L’auteure raconte en détail ces difficultés. Lorsqu’elle parle de son projet, ses camarades hommes ne cessent de la mettre en garde contre la tendance des femmes à l’« imagination » et remettent en cause sa propre légitimité, avec des arguments « masculins ». Lorsqu’elle se rend dans une usine pour interroger une ouvrière, ancienne tireuse d’élite pendant la guerre, le chef de l’usine lui demande : « Est-ce qu’il n’y a pas assez d’hommes à interroger ? Pourquoi avez-vous besoin de femmes ? À quoi bon écouter leurs délires… leurs histoires de bonnes femmes… » De même, lorsqu’elle interroge deux époux qui ont tous les deux fait la guerre, le mari est très réticent à l’idée de laisser sa femme en tête-à-tête avec l’enquêtrice : « Raconte comme je te l’ai appris », lui imposera t‑il. En d’autres termes, comme le dirait L’Histoire de la Grande Guerre patriotique, le manuel que le couple a potassé la veille au soir en prévision de l’entretien… Les femmes elles-mêmes ont sans cesse peur de ne pas bien parler et renvoient sans cesse l’auteure à leur époux, craignant sa réaction20. Elles craignent aussi de ne pas être à la hauteur du discours d’un homme : « Mais pourquoi venir me trouver, moi ? Tu devrais plutôt rencontrer mon mari, il t’en raconterait… Les noms des généraux, les numéros des unités — il se rappelle tout. Pas moi. Je ne me souviens que de ce que j’ai vécu… » Raconter l’histoire intime, l’histoire vécue, est une manière de trahir l’Histoire des hommes, l’idéologie de la grande victoire, et donc de trahir la patrie. Ainsi, une des femmes interrogées écrira à Alexievitch pour lui demander de supprimer tout ce qui, dans son témoignage, relève de l’intime et du privé. Avec ce témoignage censuré, dont il ne reste quasi rien, elle lui enverra la vérité officielle, publique : des coupures de presse, des articles, des rapports.
« Il n’y a pas de témoignage brut, de pure empathie, de vérité qui s’offre sans médiations. Il y a des choix littéraires, romanesques, ne serait-ce que dans le positionnement des témoignages. »
Alexievitch construit ses livres sur des dichotomies. Au privé s’oppose le public. À la vérité personnelle, la vérité officielle. On peut s’interroger sur la pertinence de cette distinction. De fait, l’historiographie soviétique officielle de l’après-guerre ne peut être définie comme une histoire purement militaire, rationnelle, factuelle. Elle est très largement sensible, mais il s’agit d’une sensibilité mythifiée, héroïque — qui peut également être contraire à la vérité intime des hommes eux aussi traumatisés, handicapés, etc. Dépeindre la guerre telle que l’ont vécue les femmes, comme le fait l’écrivaine, consiste moins à opposer une guerre à une autre guerre qu’à faire comprendre une totalité — l’expérience de la Seconde Guerre mondiale en URSS — et dire ainsi quelque chose d’essentiel du peuple soviétique dans son ensemble, hommes et femmes. Si opposition il y a, ce sera celle de la guerre non-dite — vécue par le peuple, par les « petites » et les « petits » — et la guerre officielle, décrite par les manuels, imposée par la propagande politique. Une démarche que poursuivra Alexievitch dans ses œuvres suivantes : en révélant la réalité de la guerre d’Afghanistan dans toute son horreur, en opposition avec l’historiographie officielle soviétique dans son livre Les Cercueils de Zincs, la réalité et la complexité de la chute d’un monde dans La Fin de l’homme rouge, réalité, qui, cette fois s’oppose de concert à l’historiographie officielle soviétique et à celle ô combien simplificatrice de l’Occident pavoisant.
Les prises de paroles que collecte Alexievitch ressemblent à de longues plaintes qui se complètent et se répondent. Le tout forme une sorte de chœur antique, une lamentation polyphonique qui chante l’amour, la violence et la souffrance. En interpellant — souvent avec tendresse — celle qui est venue recueillir leur parole, elles interpellent aussi la lectrice ou le lecteur. La puissance émotionnelle de ce livre tient grandement du sentiment de proximité et de sympathie qui traverse la plupart des témoignages. Mais il est important de ne pas perdre de vue que l’on reste dans une œuvre littéraire. Quand bien même Alexievitch prétend ne pas diriger les témoignages, n’affirme n’être qu’« une seule grande oreille sans relâche tournée vers l’autre », elle ne fait pourtant pas que « lire les voix ». Il y a derrière sa démarche un travail de sélection et de réécriture ; un choix de mise en scène, oserons-nous écrire. Alexievitch se met en scène au côté de ces femmes. Elle met en scène ces témoignages. Il n’y a pas de témoignage brut, de pure empathie, de vérité qui s’offre sans médiations. Il y a des choix littéraires, romanesques, ne serait-ce que dans le positionnement des témoignages les uns par rapport aux autres. Mais demeure cette ligne de force, qui ne retrouvons dans La Guerre n’a pas un visage de femme, mais aussi dans La Fin de l’homme rouge : la polyphonie des voix, exigeante et remarquable. Dans ce premier livre, comme dans les suivants, Alexievitch parle des limites de l’être humain. Impossible, dès lors, de réduire ces œuvres à une idéologie unilatéralement pro ou antisoviétique.
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Y aurait-il meilleur moyen, afin de rendre compte du destin collectif d’un peuple — de cette histoire totale — que cette littérature des voix ? Littérature qui s’engage de front à regarder la part refoulée de l’Histoire. Et, là, nous reviennent en mémoire les prédictions de Virginia Woolf : « Nul doute que nous ne voyions un jour la femme changer la forme du roman pour ses fins à elle, quand elle aura la liberté de ses mouvements ; nous la verrons alors préparer quelque véhicule nouveau qui ne sera pas nécessairement en vers, pour la poésie qui est en elle. Car c’est à la poésie qu’on refuse encore l’issue. Et je me mis à réfléchir sur la façon dont une femme aujourd’hui écrirait une tragédie poétique en cinq actes. L’écrirait-elle en vers ? Ne l’écrirait-elle pas plutôt en prose ? »
Photographie de bannière : DR
- La Guerre n’a pas un visage de femme, p. 30. (toutes les notes renvoient à l’édition « Thesaurus », Actes Sud, 2015.[↩]
- « Du bon et du mauvais usage du témoignage dans l’œuvre de Svetlana Alexiévitch. », Ackerman Galia, Lemarchand Frédérick, Tumultes 1/2009 (n° 32–33), pp. 29–55. L’article soulève par ailleurs bon nombre de questions très pertinentes sur l’utilisation du témoignage, dans une œuvre à la frontière entre littérature, histoire et journalisme.[↩]
- Woolf, Virginia, Une chambre à soi, trad. C. Malraux, Éditions Denoël, 1977, 1992 pour la traduction française, p. 49.[↩]
- [I]l s’agit d’une disposition culturelle. Cette attention privilégiée aux petites ou aux grandes choses n’est en rien immuablement « féminine » ou « masculine ». Chollet, Mona, Beauté fatale, La Découverte, 2012, 2015, p. 68.[↩]
- Beauté fatale, pp. 84–85.[↩]
- Ibid.[↩]
- Voir le rapport de l’expertise littéraire indépendante, sollicitée lors du procès intenté à Alexievitch pour Les Cercueils de Zinc, Christian Bourgeois, 1990, pp. 360–36.[↩]
- Voir par exemple « Nous prenons le thé, comparons nos chemisiers achetés récemment, parlons coiffures et recettes de cuisine. Regardons ensemble les photographies des petits-enfants. Et alors seulement…. » p. 23.[↩]
- « Car les femmes vivent d’une manière plus sensuelle et subtile que les hommes : elles sont ainsi faites. » p. 197.[↩]
- Ainsi Annie Lacroix-Riz parle de « spectacle “émotionnel” » et de « littérature antisoviétique larmoyante » ». Voir « Les sources d’“Apocalypse Staline” sur France 2 », Voltaire.net, novembre 2015.[↩]
- Alexievitch insiste sur cet aspect : une des filles a pour la première fois ses règles au front (p. 71), l’autre a ses dents de sagesse qui pousse quand elle rentre chez elle (p. 232).[↩]
- « C’était un pissenlit, je ne saurais dire comment il avait atterri sur ce toit, comment il y avait survécu. Chacune a fait un vœu en regardant cette fleur. » p. 279.[↩]
- Voir Ackerman et Lemarchand, art. cit.[↩]
- Voir p. 138 et p. 141. Fait remarquable, le viol des Allemandes par les soldats Soviétiques pendant la prise de Berlin est également évoqué à plusieurs reprises, voir p. 33 et p. 306.[↩]
- Sur ce phénomène, voir Beevor, Antony, La Seconde Guerre mondiale, Paris, Calmann-Lévy, 2012.[↩]
- « Et pour vous parler franchement, la femme après la guerre a remplacé aussi bien l’homme que la bête : elle portait tout sur son dos. » (p. 274).[↩]
- La fin de l’homme rouge, p. 326.[↩]
- Voir « Mais surtout, elles ressentent tout ce qu’il y a d’intolérable à tuer, parce que la femme donne la vie. Offre la vie. » p. 27.[↩]
- « Partir faire la guerre, disait-on, ce sont les hommes qui veulent ça. Vous êtes des anormales… des femmes ratées… des déficientes… », p. 208.[↩]
- « Quand vous serez partie, mon mari va m’enguirlander. Il n’aime pas ce genre de conversations. », p. 293.[↩]
REBONDS
☰ Lire notre article « Hélène Brion, entre féminisme et socialisme », E. Carme, décembre 2015
☰ Lire notre entretien avec Mona Chollet : « Écrire, c’est un acte à part entière », novembre 2015
☰ Lire notre entretien avec Bérangère Kolly : « La fraternité exclut les femmes », octobre 2015